Le blog de l'Hôpital du Valais

Gravir l’Everest… et mieux comprendre l’hypoxie

Gravir l'Everest... et comprendre l'hypoxie.

Atteindre le toit du monde, c’est se confronter à ses limites – physiques, mentales, mais aussi biologiques. Le 24 mai 2025, Dre Isabelle Frésard, médecin-cheffe, Service de pneumologie – Responsable de consultation de médecine d’altitude à l’hôpital de Martigny a posé le pied sur le sommet de l’Everest (8 848 m). Une aventure hors du commun, qui lui a offert une leçon précieuse sur ce qu’est l’hypoxie et ce que vivent ses patient·e·s.

Une ascension sans concession

Pendant plusieurs semaines, elle a gravi les pentes glacées sans assistance en oxygène jusqu’à 7 000 m, favorisant une acclimatation progressive. Mais au-delà de cette altitude, même avec une bouteille d’oxygène, chaque geste devient un effort monumental : bouger un doigt, boucler une sangle, décider de la prochaine étape… Tout se fait au ralenti.

Au niveau de la pyramide sommitale, par souci d’économiser ses dernières réserves d’oxygène, elle a réduit le débit délivré. Très vite, elle a senti la désaturation s’amplifier : essoufflement extrême, fatigue écrasante, confusion mentale. Des mots qu’elle emploie quotidiennement pour décrire les symptômes de ses patient∙e∙s souffrant de BPCO, de fibrose pulmonaire ou d’insuffisance respiratoire avancée. Cette fois, elle les vivait dans son propre corps. 

De l’Everest à la consultation : expérience et accompagnement personnalisé

Cette expérience en haute altitude n’est pas qu’un exploit sportif personnel : elle crée un pont direct entre la médecine de terrain et la pratique clinique. Les patientes et patients atteint∙e∙s d’hypoxie chronique vivent une situation similaire, heure après heure, avec une marge d’adaptation bien moindre qu’à 8 000 m. Elles ou ils doivent composer, jour après jour, avec un souffle fragile: chaque montée d’escalier, chaque promenade peut devenir un enjeu.

Dre Frésard, médecin-cheffe au Service de pneumologie du Centre Hospitalier du Valais Romand.
Dre Frésard, médecin-cheffe au Service de pneumologie CHVR

Chaque respiration devenait un défi. J’ai compris, sur le fil du rasoir, ce que signifie manquer d’oxygène, sans pouvoir y remédier instantanément. Cette expérience m’a profondément fait réfléchir sur notre manière d’accompagner celles et ceux qui vivent une hypoxie chronique.

Mon ascension m’a encouragée à repenser notre prise en charge :

  • Écoute active : reconnaître les signes d’insuffisance respiratoire avant qu’ils ne s’aggravent.
  • Accompagnement personnalisé : ajuster l’apport d’oxygène de manière optimale, ni sous-dosé ni excessif.
  • Éducation thérapeutique : enseigner à chaque patient l’importance d’une progression adaptée et du respect de ses propres limites.

Conseils pour alpinistes et patient∙e∙s

En tant que responsable de la consultation de médecine d’altitude, cette expédition me donne aussi de nouveaux outils pour conseiller les alpinistes ou randonneurs en haute montagne.

  1. Préparation physique et mentale : un entraînement progressif, qui simule l’effort respiratoire.
  2. Montée graduelle : augmenter l’altitude par paliers, laisser le temps à l’organisme de s’habituer.
  3. Respect de ses sensations : reconnaître la fatigue, le mal de tête, la somnolence ou d’autres signes évocateurs d’une pathologie de haute altitude ; descendre ou renoncer n’est pas un échec, mais un acte de sagesse.

Ces mêmes principes sont essentiels pour les patient∙e∙s hypoxiques : écouter son corps, ajuster son traitement, ne pas hésiter à solliciter son équipe médicale.

L’humilité du souffle

L’Everest m’a rappelé qu’aucune performance ne peut ignorer les signaux vitaux. Qu’il s’agisse de la maladie ou de l’altitude, le souffle impose une forme d’humilité, une prise de conscience : ralentir, observer son corps, respecter un rythme et ses limites.

C’est cette humilité que je souhaite transmettre :

  • à mes patient∙e∙s, pour qu’ils ou elles retrouvent confiance et autonomie ;
  • aux aventurier∙ères∙s de haute montagne, pour qu’ils vivent leurs rêves en toute sécurité.

Car la respiration, c’est le fil qui relie chaque instant de vie.

Prendre rendez-vous

Tous les jours ouvrables sauf le jeudi.
Hôpital de Martigny, Service de pneumologie, 027 603 95 73, martigny.pneumologie@hopitalvs.ch

Davantage d’informations sur le site.

Célia Clavien

1 commentaire

  • Bravo Isabelle ! Une performance énorme, rare et brillante. Toutes mes félicitations pour cet exploit !

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