Aujourd’hui, avec ce que l’on a appelé la « grande accélération », tout va plus vite : le nombre et la vitesse des déplacements de personnes et des échanges commerciaux, permettant une dissémination rapide des agents infectieux et de leurs vecteurs ; la croissance de la population mondiale ; le changement climatique avec l’augmentation globale des températures et ses conséquences sur la disponibilité de nourriture ou d’eau à l’origine de conflits et de déplacements de populations. Cette « grande accélération » concerne également les maladies infectieuses. Tout est lié : pour qu’il y ait une épidémie, il faut des hôtes susceptibles, éventuellement affaiblis par le manque de nourriture ou d’eau potable, regroupés dans des villes ou dans des camps de réfugiés. Il faut également que l’agent pathogène et son vecteur aient pu venir jusque là (transports maritimes et aériens intenses), se reproduire dans le bon micro-environnement et ainsi de suite.
Des conditions réunies en Europe et en Suisse
Depuis quelques années, toutes les conditions sont réunies pour voir émerger des maladies infectieuses « tropicales » en Europe et en Suisse. On sait que le moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur important de maladies telles que la Dengue (fièvre en général bénigne, mais parfois hémorragique, fréquente en Asie et Amérique du Sud), le Chikunguya (infection caractérisée essentiellement par des arthralgies fébriles, fréquente dans l’océan indien) et le Zika (virus d’encéphalites fœtales ayant été à l’origine d’une épidémie de microcéphalie au Brésil) a pu s’adapter au climat européen et a été retrouvé en Suisse depuis 2003. Il a déjà été à l’origine de petites épidémies locales de Dengue en France (Bouches-du-Rhône) et de Chikunguya en Italie.
Les anophèles, moustiques vecteurs de la malaria, ont besoin de températures un peu plus élevées que le moustique tigre et cette maladie sévère reste pour l’instant limitée aux tropiques. Cependant, cette « fièvre des marais » était déjà présente en Valais au XIXe siècle, avant les travaux d’endiguement du Rhône, et une petite épidémie locale a eu lieu en 2018 en Grèce…
Les mesures «techniques» ne suffiront pas
Le développement très rapide dans les dernières décennies d’une économie mondiale basée sur la loi de la croissance « à tout prix », nous a entrainés dans un cercle vicieux où l’activité humaine influence tellement l’environnement que ce dernier lui devient de moins en moins favorable (augmentation de la température, assèchement des ressources naturelles, acidification des océans et diminution majeure de la biodiversité). L’impact majeur sur le climat, associé à une urbanisation intense (promiscuité) et une explosion des transports internationaux, a favorisé le développement de maladies infectieuses et leur dissémination jusqu’en Europe et en Suisse.
La lutte pour éviter de futures « épidémies tropicales » en Europe passe bien sûr par une surveillance épidémiologique accrue des maladies infectieuses accompagnée de stratégies de prévention coordonnées à l’échelon national et européen. Mais les mesures purement « scientifiques » et « techniques » sans actions sur le fond, sans améliorer les inégalités sociales à l’origine de migrations ou limiter l’impact négatif de l’Homme sur l’environnement, ne permettront pas d’arrêter la progression des maladies infectieuses tropicales du Sud vers le Nord…
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Je suis atteint de la Babesia comme d autres personnes mordues par une tique, mais apparemment peu de médecin savent soigner, ça c’est inquiétant. . .